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La Chine et le Spectre de la Vengeance




Tout le monde parle de la Chine. Que ce soit à cause de la pandémie, de ses répressions à Hong Kong ou au Xinjiang, ou de sa politique agressive en mer de Chine, cette puissance est devenue incontournable.


Mais pour bien comprendre l’avenir géopolitique de la Chine, il faut surtout comprendre son Histoire et une période en particulier : le “siècle des humiliations” (XIXème siècle). En effet, le XXIème siècle est l’occasion pour la Chine de se venger et de redevenir la Puissance au cœur de tous les enjeux.


Le “siècle des humiliations” auquel je fait référence est une période pendant laquelle la Chine a été de facto colonisée par les puissances européennes. Suite aux guerres de l’opium, la Chine a été militairement envahie plusieurs fois (rébellion des boxeurs notamment) et a été contrainte à signer des traités inégaux qui avaient pour effet de favoriser les intérêts occidentaux plus que tout autre.


Cette expérience fut traumatisante pour la Chine qui jusque là était la première puissance économique du monde et ce depuis des siècles. La Chine était la référence culturelle de toute la région et toutes les routes commerciales menaient vers la Chine. Des Etats se faisaient concurrence pour avoir accès aux marchandises chinoises et chacun était prêt à faire un “kowtow” (cérémonie où une personne pose le front au sol étant à genoux devant l’Empereur en signe de soumission) pour que la Chine daigne accepter de faire affaires avec lui.


Et voilà que soudain, les chinois n’étaient plus maîtres dans leur propre pays. Tout était fait pour exploiter les ressources de la Chine et les européens étaient devenus des intouchables alors que les locaux étaient traités comme des sous-hommes.


S’en est suivi un siècle de turbulences (Révolution de 1911, Guerre Civile, Invasion japonaise et enfin fondation de la République Populaire en 1949). Lorsque la Chine s’est enfin débarrassée de ses troubles elle s’en créa des nouveaux (Grand Bond en avant, Révolution Culturelle) et ce ne fut que dans les années 1980 que la Chine a renoué avec la croissance économique et le développement technologique.


Désormais, en ce début du XXIème siècle, la Chine est à nouveau forte et capable de se permettre une expansion. C’est de cela que je vais parler à présent.


GEOGRAPHIE





La Chine possède un territoire riche en ressources agricoles et minières (elle détient d’ailleurs un quasi-monopole sur les “terres rares” qui sont des métaux incontournables pour le fonctionnement des technologies modernes comme les smartphones). Elle détient également une considérable façade maritime et un excellent réseau fluvial.


Le grand manque de la Chine dans ce domaine est son manque d’accès aux énergies. La Chine ne produit pratiquement pas de gaz et n’a aucune ressources pétrolière. Elle est donc complètement dépendante d’importations venant de la Russie ou de la Birmanie pour le gaz et du Moyen-Orient pour son pétrole. On peut donc déjà remarquer que si les Etats-Unis sont indépendants sur tous les plans, la Chine ne l'est pas.


De plus, à l’image des Etats-Unis, c’est aussi une puissance qui peut facilement envahir les autres sans risquer de se faire envahir en retour. A l’Ouest la Chine est protégée par les montagnes et le désert de Gobi, au Nord il n’y a que les espaces vides de la Sibérie et à l’Est l’océan pacifique. Toutefois, la Chine a une “épine dans le pied” : le Vietnam. Ce petit pays n’a jamais plié devant la Chine et demeure un incontournable de la région justement par rapport à sa position stratégique. Il ne faut pas non plus oublier l’autre voisin de la Chine : l’Inde. Je reviendrai sur l’Inde plus tard mais il faut déjà remarquer qu’au XXIème siècle beaucoup de choses vont se jouer entre ces deux géants qui sont concurrents sur tous les plans.


Mais si la Chine a des concurrents continentaux avec qui elle partage une frontière physique, il ne faut pas oublier ses autres concurrents proches géographiquement. Les Philippines, le Japon, la Corée du Sud et l’Australie sont tous proches de la Chine et ne lui sont pas favorables. De plus, tous ces pays sont alliés des Etats-Unis, il ont donc en leur sein des bases militaires américaines et sont protégés par le parapluie nucléaire américain. La Chine, elle, n’a qu’un seul allié : la Corée du Nord. Et celui-ci fait plus office de boulet que d’allié (cette remarque mérite un article à part entière mais disons simplement qu’à part le retard économique criant de la Corée du Nord c’est aussi un État qui contribue aux tensions sur la péninsule coréenne et en même temps refuse d’obéir à Beijing).


Et si ce n’était pas tout, il ne faut pas oublier Taïwan. L’île de Formose est si proche de la Chine continentale que la Chine ne peut de fait se projeter dans l’océan pacifique sans tout de suite avoir un “saboteur” possible près de ses côtes. Il est certain que la question de la Chine unique va être très épineuse dans l’avenir proche.


Dans tous les cas on peut déjà constater que la Chine est bien dotée mais qu’elle n’a pas une position aussi avantageuse que les Etats-Unis car elle dépend des importations en matière d’énergie et qu’elle est cernée par des puissances qui lui sont hostiles et donc beaucoup sont alliés de son rival stratégique : les Etats-Unis.


ECONOMIE





Tout le monde parle du miracle économique chinois. Celui-ci est indiscutable. Jamais n’a-t-on vu une telle réussite en si peu de temps. Mais contrairement à ce qu’on peut entendre, je suis persuadé que cette réussite est en trompe-l’oeil.


En effet on parlait de miracles économiques identiques pour l’URSS dans les années 1960 ou encore du Japon jusqu’en 1990. Toutes ses réussites ont en commun un élément : ces puissances ont “rattrapé” l’Occident. Elles ne l’ont jamais dépassé.


L’URSS, terrifiée par l’idée de réforme a préféré stagner dans les années 1970 ce qui a amené à son effondrement et le Japon est devenu trop dépendant d’un modèle économique partisan ce qui l’a amené à être une économie stagnante depuis bientôt 30 ans.


Alors oui, la Chine nous éblouit par la vitesse à laquelle elle nous rattrape. Mais elle ne fait que cela, rattraper, pas dépasser. Et la preuve en est que si la Chine est l’usine du monde et que naturellement c’est une puissance économique incontournable, son niveau de vie est bien moindre comparé à l’Occident. Certes les perspectives sont positives mais il y a du chemin à faire et une fois qu’ils nous auront rattrapés il ne nous dépasserons pas. Au demeurant, que choisir entre un modèle libéral qui nous permet d'être libres et d’avancer et un modèle totalitaire qui permet seulement de rattraper mais dont le coût est l'écrasement des libertés ? (C’est un sujet pour un autre article : “Comment le socialisme d’Etat permet de rattraper mais jamais dépasser”).


De plus, des signes de ralentissement se présentent à nous. Les investisseurs commencent à quitter la Chine pour ouvrir leurs usines ailleurs et parfois les industries stratégiques reviennent dans les pays d’origine pour des raisons évidentes.


La Chine est au courant de ce ralentissement et le parti communiste chinois s’inquiète justement d’un affaiblissement de sa propre emprise sur sa population une fois que la croissance économique aura baissé. Cette peur explique en grande partie les tours de vis répressifs prises par l’Etat chinois mais aussi leur poussée en avant en ce qui concerne Hong Kong et Taïwan, deux modèles chinois alternatifs au totalitarisme communiste.


Mais ces tours de vis risquent fort d’atteindre le développement interne (il suffit d’étudier la situation de Jackie Ma pour s’en convaincre). Et c’est pour cela que la Chine cherche à tout prix à conquérir des marchés proches autant pour l’import de matière première (d’où sa politique agressive en Afrique) qu’à l’export (d’où sa politique d’investissement dans les routes de la soie).


Ceci nous amène au plus intéressant : le jeu chinois.


GEOPOLITIQUE CHINOISE





Ce que j’appelle “le jeu chinois” c’est la nouvelle stratégie mise en place par la Chine depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping. La Chine a, pour la première fois depuis des siècles, décidé de sortir de son isolement pour se tourner vers l’extérieur. Et elle le fait car elle en a besoin.


La Chine doit garantir ses débouchés et son ravitaillement mais aussi exporter son modèle pour garantir sa survie. De fait, le totalitarisme chinois ne peut survivre dans un monde libéral et il faut donc convaincre le plus grand nombre de suivre le modèle chinois. Cette influence passe inaperçue car la Chine ne veut pas répéter l’erreur soviétique (antagonisme trop évident et agressif sur le plan idéologique). Alors la Chine utilise ses ressources financières pour faire taire les critiques (via l’auto-censure) et utilise la “cancel culture” pour ne pas être pointée du doigt. Elle profite également des divisions occidentales et des erreurs américaines pour prendre le relais là où elle le peut.


Une véritable course contre la montre est engagée où l’objectif chinois est de saisir le plus d’influence internationale possible pour dicter sa volonté au monde. Et cela passe par l’étape obligée de l’écrasement des “contre-systèmes”.


La Chine doit absolument écraser Taïwan si elle veut continuer à augmenter sa puissance. Et vu que l’armée chinoise se renforce de jour en jour, on ne peut que conclure que des plans d’invasions existent déjà.


Si on compile tous les flashpoints (lieux où un guerre peut commencer n’importe quand) la Chine se trouve dans la grande majorité d’entre eux (Corée du Nord, Taïwan, Philippines et mer de Chine). S’il y a une Troisième Guerre Mondiale, c’est dans le Pacifique qu’elle aura lieu et elle aura au cœur de ses enjeux la croissance de la sphère d’influence de la Chine.


Car ce que veut la Chine avant tout, c’est de redevenir ce qu’elle était : la puissance centrale du Pacifique, le modèle culturel de la région, la super-puissance économique devant laquelle tout le monde doit “kowtow”.


CONCLUSION




La Chine est donc un pays humilié qui cherche à se venger. Cette mécanique on la connait déjà … (Allemagne nazie, IIIème République Française, etc …). Il est donc clair que la puissance à “surveiller” c’est la Chine. C’est la puissance qui va tout chambouler dans l’ordre international actuel. Et il ne faut pas se tromper qui on a en face de nous. Quelqu’un qui a quelque chose à prouver (à soi-même et aux autres). Quelqu’un qui veut devenir incontournable et surpuissant. Quelqu’un qui voit dans sa survie l’obligation de casser un mode de vie.


Si la Chine ne change pas de l’intérieur, on n’aura d’autre choix que de “contenir” la Chine en attendant que le contexte nous soit plus favorable. Je suis persuadé que les fondements de la puissance chinoise sont plus bancals qu’on ne le croit. Mais je ne me berce pas d’illusions non plus, ce n’est pas demain que la Chine changera.


L’espoir c’est qu’un jour la Liberté vaincra de l’intérieur en Chine.


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